Perception Spatiale, un concept appliqué au Systema

February 09, 2013 by Andrea Bisaz  

Le systema est un agglomérat complexe de plusieurs composantes qui interagissent en total harmonie. D'après ma compréhension, l'un de ces grands atouts est l'utilisation de mouvements naturels et détendus dans un environnement anormalement combatif. Si l'on maitrise cela, on acquiert l'efficacité, le calme et la puissance, alors que dans le même temps son invisibilité produit la confusion et l'incertitude chez l'adversaire (cf l'article sur les neurones miroirs), ce qui offre beaucoup d'avantages dans un conflit.

Une autre sphére interessante du Systema est le "short work" (distance et coups rapprochés). C'est une façon très élégante et efficace de faire face à plusieurs adversaires à la fois et elle contient de nombreux principes cachés dans son application.

J'ai toujours été fasciné par les scénariis d'attaques multiples, car ils incorporent plusieurs facteurs cruciaux pour une bonne pratique du Systema. Un des aspects très intéressant est la perception spatiale que l'on utilise pour le "short Work".

Perception Spatiale :

Notre cerveau posséde différentes cartes cérebrales non seulement pour contrôler notre corps physique, mais également notre environnement immédiat. Nos vêtements deviennent des parties de nous mêmes lorsqu'ils sont intégrés dans nos cartes cérébrales. Ainsi que les outils et l'équipement que nous utilisons souvent. Par exemple nous pouvons facilement sentir la consistance de la nourriture que nous découpons comme si le couteau était une partie de notre corps. Des études sur le cerveau ont été menées sur un certaine espéce de singe japonais qui n'emploie pas d'outil à l'état sauvage. Lorsqu'on lui a donné un baton, cet objet n'était pas intégré dans la cartographie cérébrale du singe. Apres quelques semaines d'entrainement, le baton a commencé à s'integrer dans les cartes mentales du singe d'une façon notable.

Nous pouvons observer le même phénomène lorsqu'on donne aux éléves un baton pour combattre. Un enseignant experimenté décèlera immédiatement si un élève est familier avec le travail du baton juste en observant la manière dont il le saisit et le manipule.

Lorsque nous conduisons notre voiture, nos perceptions incluent le périmètre complet du véhicule pas seulement notre corps dans l'habitacle. Nous pouvons facilement faire une marche arrière pour rentrer dans un étroit garage. A présent si nous changeons de voiture avec des dimensions similaires mais une forme très différente, la marche arrière dans le même garage ne sera plus aussi facile. Nous devons créer une nouvelle carte cérébrale appropriée à cette nouvelle forme. Et cela devient à nouveau facile.

Lorsqu'on fait face à des adversaires, spécialement plusieurs en même temps, il est important de faire la même chose, de les inclure dans notre cartographie mentale. Ce qui est important c'est d'apprendre à inclure le concept d'un adversaire avec toutes ses caracteristiques et émotions (L'article précedent sur les neurones miroirs nous a appris que son comportement est une projection de NOS émotions). Pour y parvenir, cela requiert une certaine relaxation pour faciliter l'action des neurones miroirs. En faisant cela consciemment on dirige tranquillement son attention vers cette tache puis on amplifie la perception.

On pourra remarquer que si l'on controle facilement des objets tels que voitures et couteaux, on n'a pas la même confiance lorsqu'il s'agit de nos adversaires. C'est pour cela que nous devons consciemment intégrer nos partenaires d'entrainements afin de développer une habitude d'inclusion et de familiarié plutôt que l'évitement et l'étrangeté. Nous devons aussi cultiver une habitude de perception globale plutôt qu'une perception focalisée afin de devenir conscient de leurs émotions sans être trop affecté par ces dernières !!! Ceci nous aidera à rester relax face à une aggression ou la violence. Fondamentalement, nous nous entrainons non pas pour combattre un adversaire exterieur mais plutôt pour les inclure dans nos cartes mentales, pour qu'ils fassent partie de notre proche environnement. C'est comme si on jetait un filet et que l'on capturait nos adversaires pour les tirer vers soi. Puis nous jouons avec ces cartes mentales qui incluent nos adversaires.

Nos cerveaux vont accomplir cette tache automatiquement jusqu'a un certain point grace à nos neurones miroirs, cependant la peur et la tension peuvent démanteler ce processus. En s'entrainant consciemment à inclure nos partenaires/adversaires dans notre cartographie mentale, nous accélerons un processus de familiarité et de relaxation et nous élargissons notre perception. Nous nous concentrons moins sur un seul adversaire à la fois, ou sur une unique capacité de l'adversaire. Nous travaillons d'une façon plus inclusive avec une perception ouverte à toutes les possibilités qui s'offrent à nous.

Ceci améliore grandement notre efficacité spatiale lors du travail avec des adversaires. Et permet de minimiser les risques de blessures envers soi et ses partenaires.

Exercices : Voici quelques exemples :

Fermez les yeux et respirez profondement. Ensuite commencez par diriger votre attention sur votre enveloppe corporelle. Puis ajoutez vos vetements et integrez les à vos cartes mentales consciemment. Enfin vous pouvez jouer avec votre attention sur vos partenaires proches et a différentes distances. vous pouvez débuter avec un seul partenaire mais assurez vous de progresser vers de multiples partenaires simultanement. Ajoutez des variantes en les positionnant à différents endroits. L'exercice peut évoluer des yeux fermés aux yeux ouverts. L'exercice yeux fermés augmente la  représentation et réduit la distraction produite par la vision.

Ajoutez différents états émotionnels à vos partenaires, ainsi qu'une attention active ou passive dirigée vers vous. Votre but est simplement de ressentir la présence et la position de vos partenaires d'entrainements. Puis vous progressez pour capter leurs intentions et leurs attitudes (assurez vous d'inclure des intentions aggresives et violentes). Vous pouvez également jouer en variant la rapidité des mouvements.

L'important est d'avoir une conceptualisation mentale (représentation) d'un champ (carte cérébrale), qui inclut et perçoit vos partenaires avec une somme croissante d'informations. Gardez aussi en mémoire que vos partenaires ne seront pas toujours dans votre champ de vision, par conséquent cet exercice accroit votre conscience des gens en dehors de votre champ de vision. Vous pouvez éventuellement aller jusqu'a des exercices qui implique des frappes avec vos partenaires. Surveillez toujours votre respiration et votre rythme cardiaque.

En d'autres termes, vous avez pour but de commencer à inclure dans vos cartes mentales éphéméres toutes les personnes dans un certain rayon autours de vous.

C'est un exercice que vous pouvez pratiquer en dehors de l'entrainement, dans un café. Asseyez vous au centre avec le plus possible de personnes autours de vous. Voyez combien vous pouvez en saisir et intégrer, puis essayez de sentir leur état émotionnel, leurs mouvements. Pouvez accomplir cela avec plusieurs personnes ? Est ce que quelqu'un en dehors de votre champ de vision s'est levé ? Vous pouvez beaucoup vous amuser avec cet entrainement.

 A propos de l'auteur

Dr Andrea Bisaz est instructeur de Systema a rmaSystema-Australia à Melbourne, il s'entraine et enseigne le Systema depuis 2005. Dr Bisaz travaille également à la clinique sportive de Melbourne et peut être joint au +61411745746 ou bien sur: bisaza@optusnet.com.au.

Traduction Olivier David

Student at systemalyon

Andrea Bisaz Dr. Andrea Bisaz was a Systema Instructor at Systema Australia, in Melbourne. He had been training and teaching Systema since 2005 and Dr. Bisaz also worked at the Melbourne Sports Clinic.
Andrea passed away in July 2014.